Fondée en 1872, l’Ecole libre des sciences politiques – ancêtre de l’actuelle Sciences Po Paris – a longtemps détenu le monopole de la formation des élites politiques. Ces 150 ans d’expériences sont constitutives d’une expertise inégalée en France des problématiques publiques. C’est donc assez naturellement que l’on s’intéresse à Sciences Po lorsque l’on veut intégrer la fonction publique, pratiquer les relations internationales, devenir homme ou femme politique …
Toutefois, ce n’est qu’une petite partie des formations qui y sont dispensées. En effet, Sciences Po dispose aujourd’hui de 7 écoles et 29 masters. Les débouchés se sont donc considérablement étendus. Comment s’y retrouver ?
Nous avons d’abord les débouchés historiques de Sciences Po, qui s’appuient directement sur son ADN politique et son expertise publique. Pour ces métiers, passer par Sciences Po est quasiment indispensable : la formation est parfaitement adaptée et les diplômés de l’école sont les plus recherchés sur le marché. Par exemple : le lobbying, les métiers des transports, le conseil en secteur public ...
Ensuite, il y a certains domaines dans lesquels d’autres écoles ou université proposent des formations tout aussi reconnues que Sciences Po. Cependant, les diplômés de l’école sont très appréciés grâce à l’originalité de leur formation pluridisciplinaire. Par exemple : les métiers du droit, le journalisme …
Enfin, une dernière catégorie de débouchés : ceux pour lesquels Sciences Po ne semble pas avoir d’avantage particulier sur les formations de même niveau dispensées dans les meilleures écoles de commerce et d’ingénieurs. Il s’agit surtout des métiers du privé comme l’audit, la finance, les ressources humaines ...
I-Les débouchés historiques, pour lesquels Sciences Po est indispensable
A. La fonction publique
Grâce à la formation dispensée en master Politiques publiques et à sa Prépa Concours, Sciences Po détient de la quasi monopole de la préparation aux concours de la haute fonction publique. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : en 2019, 80% des énarques, 68% des cadres de la Banque de France, et 67% des conseillers des Affaires étrangères (concours du MEAE) en étaient issus.
Il est également possible d’intégrer la fonction publique par la voie contractuelle, c’est-à-dire sans avoir le statut de fonctionnaire. Une part importante des contractuels de catégorie A provient des IEP.
B. Les métiers du politique
Toujours grâce au master Politiques publiques, Sciences Po forme une grande partie des assistants parlementaires, collaborateurs de cabinet ministériel ou local (mairies, régions, etc.). Cette formation est également très utile pour se présenter aux élections et devenir élu local ou national.
C. Les métiers para-publics
De nombreux diplômés en affaires publiques sont employés dans le secteur privé – entreprises, cabinets, associations, fédérations professionnelles – pour travailler sur des thématiques et avec des interlocuteurs publics.
Ces métiers englobent, en vrac :
– le lobbying, au sein de cabinets, d’entreprises, de fédérations professionnelles ou d’associations (lobbying citoyen et environnemental) ;
– la communication institutionnelle ou d’influence (Havas, Image 7…) ;
– le conseil en secteur public (EY, Capgemini…) ;
– les directions des affaires publiques des grandes entreprises (Vinci, Lafarge, LVMH…).
D. Les organisations internationales
La concurrence est très rude pour intégrer les organisations internationales : des candidats du monde entier sont en lice, avec des formations aussi diverses que prestigieuses. On remarque cependant que, pour les français, Sciences Po est surreprésenté ; la plupart sont diplômés en affaires publiques, affaires européennes et relations internationales
Selon l’étude jeunes diplômés 2019 de Sciences Po, 5% de la promotion 2017 travaille pour une organisation internationale. L’intégration de ces diplômés récompense la stratégie de partenariats de l’école, qui a notamment signé des accords avec l’OCDE, le FMI ou encore l’Agence française de développement.
E. Les métiers orientés politiques publiques
L’expertise publique de Sciences Po est aussi recherchée dans le domaine des transports publics, de la politique de la ville, du logement et plus largement dans l’ensemble des métiers où se posent des questions relatives à l’intérêt général et au bien commun.
Accessibles après les masters de l’Ecole d’affaires publiques ou de l’Ecole urbaine, ces métiers peuvent être exercés dans de nombreuses structures : bailleurs sociaux, entreprises publiques ou privées de transports, cabinets d’architectes, mairies, conseils régionaux…
II- Les métiers non spécifiques à Sciences Po, mais pour lesquels cette formation est un atout
A.Les métiers du droit
Si Sciences Po était à l’origine réputée pour son enseignement du droit public – notamment pour répondre aux exigences des concours administratifs –, l’école a peu à peu colonisé le domaine du droit privé. En créant une Ecole du droit, forte de nombreux partenariats avec des cabinets d’avocats de premier plan, Sciences Po s’est effectivement imposée comme une référence de la formation des juristes, au point de créer des rivalités avec les grandes facs de droit parisiennes.
La formation juridique dispensée à Sciences Po permet aux étudiants de poursuivre plusieurs voies :
•Poursuivre une carrière dans le public. Grâce au master Carrières judiciaires et juridiques et à la classe préparatoire pour les concours de l’Ecole nationale de la magistrature, de l’Ecole nationale supérieure de la police et de l’Ecole des officiers de la gendarmerie nationale, les étudiants peuvent devenir juges, commissaires de police ou officiers de gendarmerie, respectivement.
•S’orienter vers le privé. Avec les masters Droit économique, Droit & Finance, les étudiants seront préparés à devenir juristes en entreprise ou à passer l’examen du barreau pour devenir avocat. Parmi les spécialisations possibles : droit de l’innovation, droit public économique, contentieux économique et arbitrage …
Il est également possible pour les étudiants qui le souhaitent de poursuivre leurs études pour obtenir un doctorat de droit.
B.L’enseignement et la recherche
L’Ecole doctorale permet aux étudiants de se préparer à l’enseignement et à la recherche dans les cinq disciplines fondamentales de Sciences Po : le droit, l’économie, l’histoire, la sociologie et la science politique.
Projet ambitieux qui intègre les élèves dès la première année de master et les accompagne jusqu’à la troisième année de doctorat, elle constitue selon son ancien directeur Jean-marie Donegani « une formation à la recherche et par la recherche ».
Si la formation des enseignants-chercheurs se fait traditionnellement à l’université, Sciences Po est également dotée de nombreux atouts. De petite taille, l’Ecole doctorale favorise un véritable suivi des étudiants et de nombreuses interactions avec le corps professoral et les laboratoires de recherche de Sciences Po comme le CERI, le CEVIPOF, ou encore l’OFCE, pour n’en citer que quelques-uns.
La singularité de Sciences Po par rapport à l’université est de pousser sans cesse les étudiants à se confronter à d’autres disciplines, à combiner les approches publique et privée, française et internationale. Un projet pédagogique qui se retrouve dans les statistiques d’insertion des diplômés de l’Ecole doctorale : si 65% ont rejoint l’enseignement et la recherche, 35% travaillent dans le conseil, les organisations internationales ou en entreprise.
C. Le journalisme
Bien que l’école de journalisme de Sciences Po Paris n’existe que depuis 2004, elle a rapidement su occuper une place de premier plan en France comme à l’étranger. Reconnue par la Commission paritaire nationale de l'emploi des journalistes, cette formation se classe au même niveau que l’ESJ Lille ou le CFJ.
Comme la plupart des écoles de journalisme, celle de l’IEP de Paris propose un cursus alternant théorie et pratique, avec de nombreux stages, des ateliers de méthodologie journalistique et de la production de reportages.
Son plus : l’école de journalisme fait pleinement partie de Sciences Po, qui forme également les futures élites politique, économique et intellectuelle. S’ensuit un réseau précieux, mais aussi une culture politique et une aisance à traiter des sujets variés.
III- Les métiers pour lesquels Sciences Po ne possède pas d’avantage comparatif particulier
Selon l’enquête Jeunes diplômés 2019 de Sciences Po Paris, 70% des diplômés travaillent dans le privé. Parmi eux, 19% travaillent dans le conseil ou dans l’audit, 10% dans la banque et la finance, 5% dans la communication.
Il est difficile de mesurer l’incidence qu’a eu leur parcours à Sciences Po dans le devenir professionnel de ces diplômés. Il est certain que le prestige de l’école et son classement parmi les meilleures universités du monde leur a permis d’intégrer plus facilement ces domaines professionnels exigeants.
De plus en plus d’entreprises se tournent vers les diplômés de Sciences Po pour y recruter des cadres versatiles, touche-à-tout, capables de comprendre et d’anticiper les mouvements du monde. En effet, les capacités oratoires, la culture générale et l’esprit de synthèse qui constituent la marque de fabrique de l’école sont perçues comme nécessaires dans des carrières à la fois plus internationales et plus polyvalentes.
Cependant, Sciences Po ne semble pas disposer pour ces métiers d’un avantage sur d’autres formations d’excellence, à l’instar des écoles de commerce ou d’ingénieurs, et des grandes universités parisiennes. Dans certains métiers type d’entreprise, comme la finance, les écoles de commerce pourront être meilleures que Sciences Po grâce à leur expertise technique et leur lien avec les entreprises du secteur.
En revanche, les diplômés de Sciences Po auront suivi pendant trois ans un cursus généraliste, avant de se spécialiser par exemple en finance, tout en conservant, même durant leurs années de master, des enseignements transdisciplinaires sur l’art ou la philosophie. Ils auront fréquenté des camarades ayant intégré la fonction publique, les ONG, les médias … Ils auront peut-être aussi plus de facilité à se reconvertir ou à évoluer vers différents métiers. A vous de vous demander le profil que vous souhaitez avoir !
Conclusion
Nous espérons avoir défriché pour vous la jungle des possibles pour les diplômés de Sciences Po. Cependant, n’oubliez pas que ces voies ne sont qu’indicatives.
Doté d’une formation intellectuelle solide, de sa curiosité, de son goût du débat affûté chaque jour au contact des professeurs, intervenants et étudiants de tous horizons, chaque alumni peut tracer sa propre voie.
En effet, « Sciences Po mène à tout » (ou presque) … Ce ne sont pas les alumni aux parcours les plus originaux qui contrediront cet adage ! Frédéric Beigbeder, Christian Dior, Léo Ferré ou Leïla Slimani sont tous passés par les bancs de la rue Saint-Guillaume.
Moins connus, mais tout aussi courageux, de plus en plus d’anciens deviennent agriculteurs, entrepreneurs, comédiens …
Nous espérons que vous trouverez la vôtre !