A-t-on le droit de répondre “je ne sais pas” à une question du jury sans se faire écharper ? C’est une question qui vous hante, et on comprend bien pourquoi, mais on vous assure, il n’y a vraiment pas de quoi.
Commençons par rappeler une vérité de base : le jury, ce n’est pas Julien Lepers. Alors on le dit une bonne fois pour toutes : vous n’êtes pas jugé.e.s sur le nombre de choses que vous arrivez à retenir ! Vous êtes jugé.e.s sur votre capacité à réfléchir par vous-mêmes, sur votre sens critique (variante de la même chose), sur votre esprit de synthèse, votre maturité, votre énergie, bien sûr...mais pas sur le fait que vous sachiez ou non que la Suisse a donné le droit de vote aux femmes qu’en 1971.
Explication. Quand vous ne savez pas quelque chose, ce n’est pas que vous ne le sachiez pas qui nous pose problème. Mais ce que ça dit sur vous. Si vous ne savez pas qui est le président du Yemen, ça ne veut pas dire grand chose d'autre que : vous ne pouvez pas tout savoir. Si en revanche vous nous dites avoir un intérêt pour les relations internationales et que vous aimeriez bosser un jour dans une institution comme l’ONU, ne pas savoir qui en est le patron ou en quelle année elle a été créée fera lever quelques sourcils. Dans la meilleure configuration, vous faites preuve de naïveté (“je veux travailler à l’ONU parce que je suis contre la guerre”, mais aucune connaissance sérieuse qui accompagne cet élan certes noble), dans le pire, vous faites preuve d’attirance pour l’excellence et le prestige de la chose (il y a mieux comme attribut), et souvent un mélange des deux. L’un dans l’autre, si votre intérêt pour l’ONU va au delà de votre intérêt pour ce qui brille où un vague sentiment anti-guerre, c’est-à-dire si votre intérêt pour l’ONU est réel, vous avez un minimum de connaissances qui vont avec.
Maintenant, il suffit d’inverser ce raisonnement pour comprendre combien ça pose problème au jury que vous répondiez “je ne sais pas” sur les questions directement en lien avec vos intérêts.
En fait, la question de savoir ou non répondre à une question en soulève une autre : qu’est-ce que je peux me permettre de ne pas savoir ? Et on en revient à un problème vieux comme le monde, qui est la question de la hiérarchisation du travail, qui est un des jobs-clé à faire dans une préparation.
Alors, faisons simple.
Les connaissances à avoir, c’est un peu comme un oignon.
Au centre, vous avez les connaissances sur vous. Ce sont les connaissances les plus essentielles à avoir. Si vous ne savez pas répondre à une question sur une de vos expériences, vous aurez l’air con, point. Exemple : "pourquoi vous intéressez-vous au marketing ?"...Réponse : "fleiignnstnn" + bafouillement. Sur les sujets directement liés à vous, qui vous êtes, vous devez être insubmersibles, "je ne sais pas" n'est pas acceptable. (On ne vous fait pas de dessin pourquoi).
La deuxième couche, ce sont les connaissances du monde autour de votre candidature : ça veut dire l'école, ça veut dire connaître votre future maquette des cours, ça veut dire connaître un minimum le monde autour de votre projet. Si on vous demande quel est le cours que vous attendez le plus et pourquoi, et que vous séchez, ça vous coûtera plutôt cher. Si vous dites que vous voulez devenir diplomate, mais que vous ne savez pas qui est le ministre des affaires étrangères, et qui c’était avant, pareil, ça fait mal, en terme de crédibilité. Et on en revient à ce qu’on disait sur l’ONU. Là aussi, un "je ne sais pas" est compliqué dans cette zone.
Troisième couche, le cran au dessus, c’est l’actualité liée à votre candidature. Prenons le même exemple : si votre projet c’est de devenir diplomate, et que vous dites avoir une passion pour les relations internationales, le jury sera plus en attente sur les questions d’actualité sur ces sujets-là, vous l'imaginez. Donc, ce qui est en train de se jouer au Moyen-Orient ou la Corée, les "je ne sais pas" passent plus difficilement. C'est vrai pour le projet pro, mais c’est vrai pour l’actualité de l’école : ne vous faites pas prendre en flagrant délit d’ignorance, genre ils déboursent je ne sais combien de millions pour faire un nouveau campus, et vous les regardez avec des ronds de flan quand ils vous posent la question : c’est une info qu’il faut connaître sous peine de passer pour un clampin.
Et enfin, quatrième couche, l’actualité, ou les connaissances plus générales. Là vous pouvez vous permettre de ne pas savoir des choses.
Répondons donc à la question : est-ce qu’on peut ne pas avoir de réponse à une question ? Evidemment, évidemment, oui...mais tout dépend de la couche d’oignon dans laquelle est la question. Vous avez tout à fait droit de bloquer sur une question d’actualité, mais vous n’avez pas le droit de bloquer sur les cours liés aux relations internationales à Sciences Po si c’est ça que vous voulez faire. Et j'en rajoute une couche : vous allez passer 5 ans dans une école, c’est un sacré investissement ! Ho, les ami.e.s, nous quand on va faire 5 ans quelque part, on passe une semaine entière à regarder quels cours ils font, de 1A en M2, même pas pour impressionner le jury, mais parce qu'on veut savoir dans quoi on met les pieds !
Conclusion : hiérarchisez donc votre travail de recherche : d’abord tout ce qui est en lien avec vous, ensuite l’école et votre projet, et évidemment l’actualité afférente et ensuite seulement l’actualité et les connaissances générale. Desproges disait que tout dans la vie était une question de choix, "ça commence avec tétine ou téton et ça fini avec chêne ou sapin", là c’est pareil : vous avez un temps limité pour préparer votre entretien, ne commencez pas à lire la moitié de Wikipédia : hiérarchisez.
Dernière chose. Règle ultime : quelle que soit la question, avant de dire "je ne sais pas", battez-vous. Demandez une précision sur la question, demandez au jury de reformuler, demandez 5 secondes de réflexion avant de répondre (ou prenez-les), bottez en touche, montrez que vous réfléchissez, anything. Mais battez-vous. Et quand c’est vraiment une question de type Julien Lepers et que vous séchez, vous dites “je ne sais pas”, et ça se passera très bien.
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